■ Drame au Sénat
Paris, le Sénat, 9 janvier - Hier, dans la salle de la bibliothèque du Sénat, l'huissier Merlier, sonneur de trompe de la Haute Cour, était monté sur une échelle pour chercher un livre demandé par M. Wallon, le père de la Constitution. Ses pieds glissèrent, et le malheureux huissier tombant à la renverse se cassa le bras droit à la hauteur de l'épaule. M. Wallon, à la pensée qu'à cause de lui un grand malheur était arrivé, s'évanouit dans un fauteuil.
Aux cris de M. Merlier, on accourut. Les huissiers éteignirent un commencement d'incendie provoqué par une bougie qu'avait renversée l'huissier en tombant. M. Merlier fut transporté à l'hôpital Trousseau et M. Wallon, qui avait repris ses sens, reconduit à son domicile par M. de Casabianca.
M. Merlier ne pourra reprendre son service avant deux ou trois mois.
LA CROIX, 10 janvier 1900
Un sosie
Paris VI°, 8 mai - Une noce entrait samedi à la mairie, en face de l'église Saint-Sulpice, lorsqu'une femme, portant un enfant dans ses bras, s'est précipitée au-devant du marié; on juge de l'émoi général.
- Lâche, s'écriait-elle, avant de te marier, prends au moins ton enfant que tu as abandonné avec sa mère.
La mariée pleure, le beau-père tonne, la belle-mère a ses nerfs; le malheureux futur, ahuri, se défend de son mieux de connaître cette furie.
- Tu ne me connais pas, misérable. Ose donc le dire en face, crie celle-ci en allant se planter devant lui; mais elle reste bouche béante, et doit avouer qu'elle s'est trompée, qu'une ressemblance de visage l'a abusée, et elle s'excuse du trouble qu'elle vient d'apporter parmi les gens de la fête.
C'est égal, pour un début, c'en est un dont les époux se souviendront longtemps.
LA CROIX, 10 mai 1888
Un fou tire des coups de revolver sur une fillette
Paris 6°, 12 juillet - L'un de ces derniers jours, les mamans qui surveillaient en souriant les ébats joyeux de leurs enfants à travers les paisibles allées du jardin du Luxembourg, ont eu un instant de poignante émotion.
Tandis qu'une jolie fillette de sept ans jouait au ballon avec sa gouvernante, un homme, correctement vêtu, s'approcha doucement et, tirant un revolver de sa poche, fit feu par trois fois sur l'enfant.
Celle-ci, heureusement, ne fut pas atteinte. Tandis que sa gouvernante, épouvantée, l'entraînait hors du jardin, des passants arrêtaient le meurtrier. Celui-ci, conduit au commissariat, fut fouillé. On trouva sur lui une lettre incohérente, dans laquelle il y avait cette phrase : Je tue les enfants français dans les jardins.
Après un laborieux interrogatoire, on parvint à fixer l'identité du déséquilibré. C'est un Arménien nommé Avenio Toumaeff. Il a déclaré que s'il voulait tuer des enfants français, c'était pour évoquer aux yeux des mères françaises le spectacle des scènes sanglantes qui récemment encore se sont déroulées sous las yeux des mères arméniennes, dont les familles étaient massacrées par les Turcs. Singulière façon de solliciter la pitié des mères que celle qui consiste à tuer leurs enfants !
Toumaeff va être examiné par des médecins aliénistes.
LE PETIT JOURNAL ILLUSTRÉ, 17 juillet 1909
La presse du passé est passionnante !
Regorgeant d'anecdotes ou de faits-divers, parfois croustillante, souvent sordide, parfois amusante, elle nous permet de ressentir la manière de pensée de nos aïeux, de ceux qui ont vécu en cette commune, en ce territoire, de ceux qui l'ont fait vivre et que nous visitons.
La presse passée redonne vie aux simples citoyens, à ces gens qui n'auront jamais nom en livres d'histoire.
Il est plaisant d'y voir l'évolution des importances: en 1900, le commissaire fait une enquête pour un vol de jambon.
La violence est importante: violences ménagères ou non sont courantes, violences villageoises, banditisme ou non aussi ; les comptes se règlent à coups de poings, de bâtons ou autres armes.
Les cuites sont monnaie courante et pas exclusives de certaines régions: nombre de nos aïeux - ayant sans doute très soif, picolent sec !
Un prix spécial devrait être décerné à certains journalistes de cette presse ancienne: les coupures concernant les cuites et amendes en découlant sont parfois d'un humour extraordinaire.
Nous ne pouvons que vous conseiller de lire et acheter la Presse: vous la ferez vivre et imprimerez l'Histoire !