On fait des draps pour les Français.
Dans les hôpitaux de tous pays, les objets de pansement qui ont servi, et qui sont naturellement chargées de sanies, de pus, de microbes, doivent être incinérés. Nul doute qu'ils le soient. Mais dans certaines cliniques particulières, l'avidité des employés, favorisé par un défaut de surveillance, a créé un horrible commerce: au lieu d'être détruits, les objets de pansement sales et contaminés sont vendus à des brocanteurs spéciaux , qui les compriment en ballots et qui tâchent d'en tirer parti.
D'Allemagne, on expédie chez nous de notables quantités, qui servent de matière première, dans quelques usines du Midi, pour la fabrication de draps à bon marché, dont on trouve le débit dans les campagnes.
Avant la transformation des chiffons en drap, il est procédé à une désinfection sommaire, à un décantage très insuffisant. Mais avant cette désinfection illusoire, les vieilles compresses, ouates, gazes pleines de sanies, de pus et de microbes, sont triées par des femmes et des enfants. Ces malheureux manient, respirent et propagent autour d'eux des germes de mort. Leur besogne est répugnante; il leur arrive de trouver des lambeaux de chairs corrompues adhérents aux pansements. Et les inspecteurs du travail en font gravement des rapports non suivis d'effet.
L'administration des douanes et le service de l'hygiène assurent qu'ils n'ont pas le pouvoir d'arrêter ces abominables colis à la frontière comme on arrêterait un colis de livres obscènes ou une vache atteinte de la fièvre aphteuse. Il n'est pas non plus possible d'interdire aux patrons d'employer des femmes et des enfants sans protection à ces travaux.
LE MATIN - 19 juillet 1910
La presse du passé est passionnante !
Regorgeant d'anecdotes ou de faits-divers, parfois croustillante, souvent sordide, parfois amusante, elle nous permet de ressentir la manière de pensée de nos aïeux, de ceux qui ont vécu en cette commune, en ce territoire, de ceux qui l'ont fait vivre et que nous visitons.
La presse passée redonne vie aux simples citoyens, à ces gens qui n'auront jamais nom en livres d'histoire.
Il est plaisant d'y voir l'évolution des importances: en 1900, le commissaire fait une enquête pour un vol de jambon.
La violence est importante: violences ménagères ou non sont courantes, violences villageoises, banditisme ou non aussi ; les comptes se règlent à coups de poings, de bâtons ou autres armes.
Les cuites sont monnaie courante et pas exclusives de certaines régions: nombre de nos aïeux - ayant sans doute très soif, picolent sec !
Un prix spécial devrait être décerné à certains journalistes de cette presse ancienne: les coupures concernant les cuites et amendes en découlant sont parfois d'un humour extraordinaire.
Nous ne pouvons que vous conseiller de lire et acheter la Presse: vous la ferez vivre et imprimerez l'Histoire !