Alfortville

Anecdote locale

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■ Le bigame d'Alfortville



Alfortville

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  • FrançaisAlfortville
  • Population44 700
    Gentilé
  • Superficie3,67 km²
  • Densité12179.84 /km²
  • Latitude48° 48 '60" N°
    Longitude2° 25 '0" E°
  • Latitude48.799999°
    Longitude2.416670°
  • Alfortville18 pages


Rue Bric et Brac

⌘ Le bigame d'Alfortville

Le 5 mars 1886, Léon Lecouty épousait Blanche Levanneur en mairie de Maisons, actuellement Maisons-Alfort. Passionné de pêche à la ligne, Lecouty se rendait souvent à Alfortville pour y pratiquer son hobby, mot qui à cette époque n'était pas en langue française. Il y fit connaissance de la belle Blanche Levanneur, fille de l'aubergiste...

Le charme de la jeune fille frappa immédiatement le cœur de notre Léon National qui s'empressa de lui faire cour assidue pendant plus d'un an. Jouant de son charme et séducteur galant, il couvrit la jeune fille de présents et de cadeaux ; il fit d'ailleurs de même avec les père et mère de notre Blanche alfortvillaise. Devant tant de prévenance, la jeune demoiselle ne resta pas insensible aux charmes du Léon, qui, non seulement était bel homme, mais bénéficiait d'une rente de 20.000 francs, avait un frère officier chez les zouaves - cela place son homme qui, en plus, faisait construire belle demeure à Alfortville en vue de s'y installer.


Pêche à la ligne

Le moment arrivé, notre Léon fit demande en mariage. Si cette première demande vit refus de l'aubergiste, notre Léon, homme déterminé continuant à faire le matou, réussit sa seconde demande ; la main de la jeune fille lui fut accordée. Le Léon fit alors tour de famille, rencontrant les oncles , les tantes, les cousins, le beau-frère à venir et la table de l'aubergiste lui fut ouverte toute grande. La date du mariage fixée au 5 mars 1896, les préparatifs allèrent bon train: on réserva le restaurant, à Saint-Mandé ; Léon réserva une chambre pour la nuit de noce ainsi qu'un voyage à Fontainebleau...

Arrive le jour des noces, tous sont sur leur trente-et-un ; même Léon qui arbore un superbe costume de marié avec une belle cravate blanche que Madame Lecouty, pensant que son mari allait au mariage d'un ami, lui a délicatement arrangé. Son pantalon étant fripé, Léon Lecouty avait même emprunté le pantalon de son beau-frère - le premier bien sûr.

Maire, accords et Oui tout sourire ; curé, église et Oui plein d'allégresse. Nos jeunes tourtereaux sont mariés pour le meilleur et pour le pire qui arrive aux pas rapides de Madame Lecouty, première dame et première femme de notre chaud lapin taquinant goujons et jupons...

Étonnée par la tenue resplendissante de son mari - les femmes ont bons pressentiments, Madame Lecouty arriva à la mairie de Maisons quelques heures après le mariage civil. Rencontrant le secrétaire du maire, elle tomba en pâmoison en apprenant que son mari, notre Léon coureur de jupons, venait de se marier avec une certaine Blanche Levanneur, devenue Madame Blanche Lecouty il y a peu. Reprenant ses esprits, et aidée du secrétaire de mairie, elle chercha le bon commissariat pour y déposer plainte alors que le secrétaire du maire filait prévenir discrètement le père Levanneur que son beau-fils était bigame, cela en plein dîner, à Saint-Mandé, dans ce bon restaurant où la noce célébrait les mariés dans la Joie, la bonne humeur et l'allégresse.

Nous vous laissons imaginer la scène au restaurant et l'ambiance tomber comme un soufflé raté: Madame Blanche Lecouty découvrant ne pas être Madame Lecouty et tombant en pleurs dans les bras de sa mère ; le père Levanneur devenant rouge comme ces homards qu'ils avaient peut-être mangé, ses jugulaires gonflées à exploser, le sang aussi rouge que ces boudins présentés au menu...

Le sieur Chapart, témoin du Léon, scandalisé, lui présenta un couteau en lui demandant de se tuer ; Lecouty lui répondit que cela faisait trop mal. Hurlant que le Léon lui avait volé sa fille, notre père Levanneur se précipita alors sur Lecouty pour lui tordre le cou mais le svelte Léon fut plus rapide et se défila à force du jarret alors que les convives, tous furieux, le coursaient pour le jeter dans la Seine - ce à quoi il leur criait que l'eau était trop froide, ce que rapportent les procès-verbaux. Acculé, Léon sorti alors un pistolet puis s'engouffra dans un fiacre qui l'attendait à lieu déterminé d'avance. Ayant oublié son pardessus, il s'offrit le culot d'aller néanmoins le rechercher à la barbe de tous les invités encore présents.

N'étant jamais aussi bien caché que là où l'on ne cherche pas, Lecouty retourna chez sa femme - la première, qui lui pardonna sa folie. L'Honneur Lecouty étant engagé, il firent une tentative de suicide par asphyxie mais Madame, se ravisant, lui déclara qu'ayant détruit l'Honneur de la famille tout seul, il pouvait mourir tout seul. Lecouty, Léon de son prénom, se décida donc, le lendemain, à se gaver de Laudanum ; il n'en fut que très malade, déclara un témoin. Cette orgie de Laudanum ne conduisit pas notre Léon au cimetière mais au poste de police qui se chargea de le garder au frais avant sa visite au tribunal. C'est l'agent Gaillarde, chargé de surveiller le domicile de Lecouty qui informa le chef de la sureté Huensch que madame Lecouty - la première, rencontrait secrètement son mari qui se cachait dans un garni ; l'homme y fut arrêté rapidement. Léon Lecouty, peu après, dû répondre de divers vols en bijouteries devant le tribunal correctionnel qui remarqua que Léon, s'il avait la langue bien déliée, avait aussi les doigts fort agiles. Il fut jugé pour bigamie et condamné à 5 ans de prison.

Le procès se déroula en temps et en heure ; les témoins défilèrent: parents Levanneur ; Blanche, qui retrouvera un mari rapidement - monogame sembla-t-il ; les témoins ; les invités, le restaurateur et tous ceux qui avaient à parler et souhaitaient témoigner dans ce vaudeville. Les séances furent d'une grande hilarité ; la naïveté provoquant souvent l'hilarité, voici quelques passages collectés au tribunal:

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Brest (BY): rue Karl Marx en 1987

Le témoignage de M. Saffroy, marchand de vin est à souligner:

- Quand j'ai su que c'était un bigame, je me suis levé de table et nous lui avons flanqué une chasse, Chapart et moi. Comme il ne voulait pas se foutre à l'eau parce qu'il pleuvait à verse et comme il refusait de se poignarder, parce que ça faisait trop de mal, je lui ai dit:

- Attends, je m'en vas te faire voir comment on tue un gaillard comme toi !
 Je l'ai culbuté dans la boue et je crois bien que je l'ai un peu étranglé. Il a alors tiré son revolver en criant: - Approchez maintenant !
 Lecouty était suivi de son cocher qui criait:
 - Ne faites pas de mal à mon client
.

Monsieur Maire, beau-frère de Lecouty et frère de Blanche, courut au commissariat demander de l'aide mais, incapable de parler sous l'émotion, les policiers le mirent à la porte comme vil plaisantin. Quant au cocher, il ameuta la foule qui nous est tombé dessus ; cela permettant à Lecouty de s'échapper en compagnie de son cocher...

Léon Lecouty, super mec ?

Les journaux de l'époque donnent description de Léon Lecouty, ouvrier bijoutier sertisseur qui gagnait bien sa vie. L'homme porte les cheveux en brosse ; ils sont d'un blond cendré. Comme tous hommes de l'époque, il porte moustache ; elles sont blondes et, disent les journalistes, imperceptibles. L'homme n'est pas beau: il a le front fuyant, les pommettes saillantes, une maigreur de coq étique, le nez arqué, les mandibules accentuées et le menton osseux. Si sa voix est claire et lui permettrait de jouer les jeunes premiers à Montmartre, le reste est laid aux critères esthétiques masculins de l'époque.