■ Belle famille
Arzano, 3 avril - Le 15 octobre 1875, un sieur le Bouêdec, cultivateur en la commune de Caudan, se rendit au bourg d'Arzano, pour y traiter un marché de pommes. Le soir, il ne reparut pas à son domicile, et quatre jours après, on retrouva son cadavre dans un champ voisin de la route qu'il avait dû suivre pour revenir d'Arzano à Caudan.
Le Bouëdec avait, en effet, passé la journée du 15 octobre à Arzano, et un sieur Esvan l'avait rencontré, vers sept heures du soir, se dirigeant vers Caudan ; il était suivi de deux hommes qui lui tenaient, disait-il, de mauvais propos. Une instruction fut ouverte, deux individus étrangers au pays avaient été vus à Arzano dans la journée du crime, et les soupçons pesèrent sur eux ; mais il fut impossible de les retrouver, et l'information fut, momentanément au moins, abandonnée.
Vers la même époque, les environs de Lorient furent le théâtre d'une suite de méfaits audacieux : depuis le 10 décembre 1875 jusqu'au mois de septembre 1877, plus de soixante-dix vols furent commis, et malgré d'incessantes recherches, les coupables restèrent inconnus.
Sur les indications d'un enfant, témoin accidentel d'un vol commis le 22 septembre 1877, les soupçons se portèrent sur un nommé Le Cordroc'h, ouvrier au port de Lorient, et sur Évano, fabricant de galoches, qui fréquentait assidûment Le Cordroc'h.
Une perquisition faite au domicile de ces deux hommes amena la découverte d'une foule d'objets dont ils ne purent expliquer la provenance, et ils se reconnurent alors coupables de presque tous les vols commis depuis deux ans aux environs de Lorient.
Au cours de l'instruction, ils furent confrontés avec plusieurs habitants d'Arzano. Ils les reconnurent pour les deux hommes qui, le 15 octobre 1875, avaient marchandé du cidre et qui avaient dû faire route le soir avec Le Bouëdec. On trouva sur Le Cordroc'h un couteau qui fut reconnu pour avoir appartenu à Le Bouëdec.
Le Cordroc'h et Évano, reconnus à l'audience par tous les témoins pour être les deux hommes qui ont acheté du cidre à Arzano le 15 octobre 1875, opposent à ces témoignages d'énergiques dénégations ; ils déclarent n'être jamais allés à Arzano.
Évano est accusé en outre, d'avoir, dans le but de s'évader, tenté, le 12 octobre 1877, de mettre le feu à la prison de Lorient. Il reconnaît le fait matériel, mais affirme avoir agi dans un moment de désespoir et n'avoir songé qu'à se donner la mort.
Le verdict du jury a été affirmatif sur la question de meurtre et de tentative d'incendie, ainsi que sur la plupart des griefs d'accusation relatifs aux vols. Les femmes Évano et Le Cordroc'h ont été également reconnues coupables de complicité. Le verdict est mitigé en ce qui concerne les deux femmes par l'admission de circonstances atténuantes.
En conséquence, la cour a condamné Le Cordroc'h et Évano à la peine de mort, et les deux autres accusées chacune à trois années d'emprisonnement.
La délibération du jury n'a pas duré moins de trois heures.
Les accusés se sont pourvus contre l'arrêt qui les a condamnés. Une demande de commutation de peine a été signée sur-le-champ par les jurés qui avaient siégé dans l'affaire.
LE RAPPEL - 3 avril 1878
Spectateur victime d'un maladroit
Arzano - Au cours d'une fête locale, organisée à Arzano, un jeune cultivateur concourait pour le lancement d'une boule de fonte pesant 4 kg. Par suite de circonstances mal définies, la boule est allée frapper à la tête un jeune spectateur, nommé Pierre Rollo, âgé de 16 ans, cultivateur à Arzano, qui a eu le crâne défoncé.
Son état est très grave.
LA CROIX - 21 juin 1929
La presse du passé est passionnante !
Regorgeant d'anecdotes ou de faits-divers, parfois croustillante, souvent sordide, parfois amusante, elle nous permet de ressentir la manière de pensée de nos aïeux, de ceux qui ont vécu en cette commune, en ce territoire, de ceux qui l'ont fait vivre et que nous visitons.
La presse passée redonne vie aux simples citoyens, à ces gens qui n'auront jamais nom en livres d'histoire.
Il est plaisant d'y voir l'évolution des importances: en 1900, le commissaire fait une enquête pour un vol de jambon.
La violence est importante: violences ménagères ou non sont courantes, violences villageoises, banditisme ou non aussi ; les comptes se règlent à coups de poings, de bâtons ou autres armes.
Les cuites sont monnaie courante et pas exclusives de certaines régions: nombre de nos aïeux - ayant sans doute très soif, picolent sec !
Un prix spécial devrait être décerné à certains journalistes de cette presse ancienne: les coupures concernant les cuites et amendes en découlant sont parfois d'un humour extraordinaire.
Nous ne pouvons que vous conseiller de lire et acheter la Presse: vous la ferez vivre et imprimerez l'Histoire !