■ Assassinat dans les forges de Terrenoire
Saint-Étienne, 15 mai - Un acte de brutalité inqualifiable vient de se produire aux forges de Terrenoire. Un ouvrier d'origine italienne, le nommé Bernardi, âgé de vingt-neuf ans, a tué d'un coup de brique, un jeune homme de seize ans, nommé Julien R. qui lui servait d'aide.
Voici comment le crime a été commis :
Bernardi est un homme très violent et d'une force musculaire incomparable. Il se livre souvent à la boisson, et, quand il est gris, il devient d'une méchanceté redoutable. Avant-hier, vers onze heures du matin, il dit à son aide, Julien, de lui passer une brique dont il avait besoin pour consolider une pièce. Le jeune homme n'entendit pas l’ordre que lui donna Bernardi et continua son travail.
— Veux-tu aller de suite me chercher ce que je te demande ? lui dit alors l'ouvrier, sinon je te mange les entrailles.
Julien, dont la douceur était connue de tous les ouvriers des forges, se leva alors lentement et dit à Bernardi :
— J'y vais parce que c'est mon devoir; mais, tout gros que vous êtes, vous ne me faites pas peur.
À ces mots, Bernardi, ivre de colère et de boisson, s'élança vers l'endroit où se trouvait la brique dont il avait besoin et, sans dire un mot, en asséna un coup d'une violence inouïe sur le crâne du pauvre Julien. Celui-ci poussa un cri terrible et tomba comme une masse. Les ouvriers de l'usine, attirés par ce bruit, vinrent à la hâte et aperçurent l'enfant baignant dans son sang. Le crâne était enfoncé par le choc et l'œil gauche sortait de son orbite. On eut toutes les peines du monde à s'emparer de Bernardi, qu'on finit pourtant par garrotter solidement il a été mis immédiatement en état d'arrestation.
Quant à la victime, après deux heures d'une souffrance effrayante, elle a rendu le dernier soupir.
LA LANTERNE - 19 mai 1877
La presse du passé est passionnante !
Regorgeant d'anecdotes ou de faits-divers, parfois croustillante, souvent sordide, parfois amusante, elle nous permet de ressentir la manière de pensée de nos aïeux, de ceux qui ont vécu en cette commune, en ce territoire, de ceux qui l'ont fait vivre et que nous visitons.
La presse passée redonne vie aux simples citoyens, à ces gens qui n'auront jamais nom en livres d'histoire.
Il est plaisant d'y voir l'évolution des importances: en 1900, le commissaire fait une enquête pour un vol de jambon.
La violence est importante: violences ménagères ou non sont courantes, violences villageoises, banditisme ou non aussi ; les comptes se règlent à coups de poings, de bâtons ou autres armes.
Les cuites sont monnaie courante et pas exclusives de certaines régions: nombre de nos aïeux - ayant sans doute très soif, picolent sec !
Un prix spécial devrait être décerné à certains journalistes de cette presse ancienne: les coupures concernant les cuites et amendes en découlant sont parfois d'un humour extraordinaire.
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