Cayeux-sur-Mer

a_1
 :
télégram V-Kontakte Facebook Whatsapp Tchinggiz X
🎲 ⤇ Les massacres à Sloutsk

Sponsor

cayeux-sur-mer
<Cliquez l'image>

■ 

Un jour, un poème naquit par sa plume...

Né dans la commune, il fut connu pour ses écrits ou, inspiré par Cayeux-sur-Mer et tombé sous le charme de ses paysages ou de ses habitants, il laissa s'exprimer la muse pour écrire quelques belles lettres malheureusement devenues souvent trop peu connues ou oubliées.

Nous souhaitons vous les faire découvrir à travers cette page et vous faire apprécier ce si riche et beau passé malheureusement fort négligé et oublié...


Cayeux-sur-Mer

cayeux-sur-mer

  • FrançaisCayeux-sur-Mer
  • Ch'picardTchéyeu
    ( Picard )
  • Population2 900
    Gentilé
  • Superficie26,29 km²
  • Densité110.31 /km²
  • Latitude50° 11 '60" N°
    Longitude1° 29 '60" E°
  • Latitude50.183300°
    Longitude1.483330°
  • Cayeux-sur-Mer16 pages


Rue Bric et Brac

⌘ Le petit testament

◎ Le Petit testament de Maïtre François Villon fait l' An 1456

I
Mil quatre cent cinquante et six,
Je, François Villon, escollier,
Considérant, de sens rassis,
Le frein aux dents, franc au collier
Qu'on doit ses oeuvres conseiller,
Comme Vegèce le raconte,
Saige Romain, grand conseiller,
Ou autrement on se mescompte.

II
En ce temps que j'ay dit devant,
Sur le Noël, morte saison,
Lorsque les loups vivent de vent,
Et qu'on se tient en sa maison,
Pour le frimas, près du tison :
Cy me vint vouloir de briser
La très amoureuse prison,
Qui souloit mon cueur desbrisé.

III
Je le feis en telle façon,
Voyant Celle devant mes yeuls
Consentant à ma deffaçon,
Sans ce que jà luy en l'ust mieulx;
Dont je me deul et plains aux cieulx,
En requérant d'elle vengencc
À tous les dieux veuerioux,
Et du grief d'amours allégence.

IV
Et, se je pense à ma faveur,
Ces doulx regrets et beaulx semblans
De très decopvante saveur
Mo tresperccnt jusques aux flancs :
Bien ilz ont vers moy les piez blancs
Et me faillent au grant besoing.
Planter me fault autre complans
Et frapper en un autre coing.

V
Le regard de Celle m'a prins,
Qui m'a esté félonne et dure;
Sans ce qu'en riens ayc mesprins,
Veult et ordonne que j'endure
La mort, et que plus je ne dure.
Si n'y voy secours que fouir.
Rompre veult la vive souldure,
Sans mes piteux regrets ouir !

VI
Pour obvier à ses daugiers,
Mon mieulx est, ce croy, de partir.
Adieu! je m'en voys à Angiers,
Puisqu'el ne me veult impartirv Sa grâce, ne me départir.
Par elle meurs, les membres sains ;
Au fort, je meurs amant martir,
Du nombre des amoureux saints !

VII
Combien que le départ me soit
Dur, si fault-il que je m'esloingne.
Comme mon pauvre sens conçoit :
Autre que moy est en queloingne,
Dont onc en forest de Bouloiugne
Ne fut plus altéré d'humeur.
C'est pour moy piteuse besoingne :
Dieu en vueille ouïr ma clameur !

VIII
Et puisque départir me fault,
Et du retour ne suis certain :
Je ne suis homme sans deffault,
Ne qu'autre d'assier ne d'estaing.
Vivre aux humains est incertain,
Et après mort n'y a relaiz :
Je m'en voys en pays loingtaing;
Si establiz ce présent laiz.

IX
Premièrement, au nom du Père.
Du Filz et du Saint-Esperit,
Et de la glorieuse Mère
Par qui grâce riens ne périt,
Je laisse, de par Dieu, mon bruit
A maistre Guillaume Villon,
•Qui en l'honneur de son nom bruit
Mes tentes et mon pavillon.

X
A celle doneques que j'ay dict,
Qui si durement m'a chassé,
Que j'en suys de joye interdict
Et de tout plaisir dechassé,
Je laisse mon coeur enchâssé,
Palle, piteux, mort et transy :
Elle m'a ce mal pourchassé,
Mais Dieu luy en face mercy.

XI
Et à maistre Ythier, marchant,
Auquel je me sens très tenu,
Laisse mon hranc d'acier tranchant,
Et à maistre Jehan le Cornu,
Qui est en gaige détenu,
Pour ung escot six solz montant,
Je vueil, selon le contenu,
Qu'on luy livre, en le racheptant.

XII
Item, je laisse à Sainct-Amaat
Le Cheval Blanc avec la Mulle,
Et à Blaru, mon dyamant
Et l'Asne rayé qui reculle.
Et le décret qui articulle :
Omnis utriusque sexus,
Contre la Carmelisle bulle,
Laisse aux curez, pour mettre sus.

XIII
Item, à Jehan Trouvé,bouchierd,
Laisse le mouton franc et tendre,
Et ung tachon pour esmo.ucher
Le boeuf couronné qu'on veult vendre,
Et la vache qu'on ne peult prendre.
Le vilain qui la trousse au col,
S'il ne la rend, qu'on le puist pendre
Ou estrangler d'un bon licol !

XIV
Et à maistre Robert Vallée,
Povre clcrgeon au Parlement,
Qui no tient ne mont ne vallée.
J'ordonne principalement

Qu'on luy baille légèrement,
Mes brayes, estans aux trumellières,
Pour coeffer plus honestement
S'aniye Jehanneton de Minières.

XV
Pour ce qu'il est de lieu honeste,
Fault qu'il soit niyeulx recompensé,
Car le Saint-Esprit l'admoneste,
Ce obstant qu'il est insensé.
Pour ce, je me suis pourpensé,
Qu'on lui baille l'Art de mémoire,
Puys qu'il n'a sens mais qu'une aulmoire,
A recouvrer sur Malpensé !

XVI
Item plus, je assigne la vie
Du dessusdict maistre Robert...
Pour Dieu! n'y ayez point d'envie !
Mes parens, vendez mon haubert,
Et que l'argent, ou la pluspart,
Soit employé, dedans ces Pasques,
Pour achepter à ce poupart
Une feaestre emprès Saint-Jacques.

XVII
Derechief, je laisse eD pur don
Mes gands et ma hucque de soye
A mon amy Jacques Cardon ;
Le gland aussi d'une saulsoye,
Et tous les jours une grosse oye,
Et ung chappon de haulte gresse;
Dix muys de vin blanc comme croyes,
Et deux procès, que trop n'engresse.

François Villon
Portrait de François Villon en 1489

XVIII
Item, je laisse à ce jeune homme,
René de Montigny, troys chiens ;
Aussi à Jehan Raguyer, la somme
De cent frans, prins sur tous mes biens;
Mais quoy! Je n'y comprens en riens
Ce que je pourray acquérir :
On ne doit trop prendre des siens,
Ne ses amis trop surquerir.

XIX
Item, au seigneur de Grigny
Laisse la garde de Nygon,
Et six chiens plus qu'à Montigny.
Yicestre, chastcl et donjon ;
Et à ce malostru Changon,
Mouton qui le tient en procès,
Laisse troys coups d'un g escourgon,
Et coucher, paix et aise, en ceps.

XX
Et à maislre Jacques Raguyer,
Je laisse l'Abreuvoyr Popin,
Pour ses paouvres seurs grafignier;
Tousjours le choix d'ung bon lopin,
Le trou de la Pomme de pin ;
Le doz aux rains, au feu la plante,
Emmailloté en jacopind ;
Et qui vouldra planter, si plante.XXI
Item, à maistre Jehan Mautaiuct
Et maistre Pierre Basannier,
Le gré du Seigneur, qui attainct
Troubles, forfaits, sans espargiiier
Et à mon procureur Fournier,
Bonnetz courts, chausses semellées,
Taillées sur mon cordouennier,
Pour porter durant ces gellées.

XXII
Item, au chevalier du guet,
Le heaulme luy establiss ;
Et aux piétons qui vont d'aguet
Tastonnant par ces establis,
Je leur laisse deux beaulx rubis,
La lcnlernc à la Picrre-au-Let...
Voire-mais, j'auray les Troys Mets,
S'ilz me meinent en Chastellet.

XXIII
Item, à Perrenet Marchant,
Qu'on dit le Bastard de la Barre,
Pour ce qu'il est ung bon marchant,
Luy laisse troys gluyons de feurre
Pour estendre dessus la terre
A faire l'amoureux mestier,
Ou il luy fauldra sa vie querre,
Car il ne scet autre mestier.

XXIV
Item, au Loup et à Chollet,
Je laisse à la foys un canart,
Prins sous les murs, comme on souloit,
Envers les fossez, sur le tard ;
Et à chascun un grand tabart
De cordelier, jusques aux pieds,
Busche, charbon et poys au lart,
Et mes housaulx* sans avantpiedz.

XXV
Derechief, je laisse, eu pitié,
A troys petilz enfans tous nudz,
Nommez en ce présent traictié,
Paouvres orphelins impourveuz,
Tous deschaussez, tous despourveus,
Et desnuez comme le ver ;
J'ordonne qu'ils seront pourveuz,
Au moins pour passer cest yver.

XXVI
Premièrement, Colin Laurens,
Girard Gossoyn et Jehan Marceau,
Desprins de biens et de parens,
Qui n'ont vaillant l'anse d'ung ceau,
Ghascun de mes biens ung faisseau,
Ou quatre blancs, s'ilz l'ayment mieux
Ils mangeront maint bon morceau,
Ces enfans, quand je-seray vieulx !

XXVII
Item, ma nomination,
Que j'ay de l'Université,
Laisse par résignation,
Pour forclorre d'adversité
Paouvres clercs de ceste cité,
Soubz cest intendit contenuz
Charité m'y a incité,
Et Nature, les voyant nudz.

XXVIII
C'est maistre Guillaume Colin
Et maistro Thibault de Yitry,
Deux paouvrcs clercs, parlans latin,
Paisibles enfans, sans estry,
Humbles, bien cbantans au leclry.
Je leur laisse cens recevoir
Sur la maison Guillot Gueuldry,
En attendant de mieulx avoir.

XXIX
Item plus, je adjoinetz à la Grosso
Celle de la rue Sainct-Anthoine,
Et ung billarl 6 de quoy on crosse,
Et tous les jours plain pot de Seine,
Aux pigons qui sont en l'essoine,
Enserrez soubz trappe volière,
Et mon mirouer bel et ydoyne,
Et la grâce de la geollière.

XXX
Item, je laisse aux hospitaux
Mes châssis tissus d'araignée ;
Et aux gisans soubz les estaux,
Chascun sur l'oeil une grongnée,
Trembler à chière renffrongnée,
Maigres, velluz et morfonduz;
Chausses courtes, robbe rongnce,
Gelez, meurdriz et enfonduz.

XXXI
Item, je laisse à mon barbier
Les rongneures de mes cheveulx,
Plainement et sans destourbier;
Au savetier, mes souliers vieulx,
Et au fripier, mes habitz tieulx
Que quant du tout je les délaisse ;
Pour moins qu'ilz ne coustèrent neufz
Charitablement je leur laisse.

XXXII
Item, aux Quatre Menclians,
Aux Filles Dieu et aux Beguynes,
Savoureulx morceaulx et frians,
Chappons, pigons, grasses gelinos,
Et puis prescher les Quinze Signes,
Et abatre pain à deux mains.
Carmes chevaulchent nos voisines,
Mais cela ne m'est que du meins.

XXXIII
Item, laisse le Mortier d'or
À Jeban l'Espicier, de la Garde,
Et une potence à Sainct-Mor,
Pour faire ung broyer à moustarde.
Et celluy qui feit l'avant-garde,
Pour faire sur moy griefz exploitz,
De par moy sainct Anthoine Tarde
Je ne lui lairray autre laiz.

XXXIV
Item, je laisse à Mairebeuf
Et à Nicolas de Louvieulx,
A chascun l'escaille d'un oeuf,
Plaine de frans et d'escus vieulx.
Quant au concierge de Gouvieulx,
Pierre Ronseville, je ordonne,
Pour luy donner encore mieulx,
Escus telz que prince les donne.

XXXV
Finalement, en escrivaut,
Ce soir, seullet, estant en bonne,
Dictant ces laiz et descripvant,
Je ouyz la cloche de Sorbonne,
Qui tousjours à neuf heures soiiuo
Le Salut que l'Ange prédit;
Cy suspendy et cy mis bonne,
Pour pryer comme le eueur dit.

XXXVI
Cela fait, je me entre-oubliai,
Non pas par force de vin boire,
Mon csperïl comme lié ;
Lors je senly darne Mémoire
Rescondre et mectre en son aulmoire
Ses espèces collatérales,
Oppinalive faulce et voire,
Et autres intellectualles.

XXXVII
Et mesmement l'extimalive,
Par quoy prospérité nous vient;
Similative, formative,
Desquelz souvent il advient
Que, par leur trouble, homme devient
Fol et lunaticque par moys :
Je l'ay leu, et bien m'en souvient,
En Aristote aucunes fois.

XXXVIII
Doncques le sensif s'esveilla
Et esvertua fantasie,
Qui tous argeutis resveilla,
Car la souveraine partie,
En suspens, estoit amortie
Par oppression d'oubliance,
Qui en moy s'estoit espartie
Pour montrer des sens l'alliance.

XXXIV
Puisque mon sens fut à repos
Et l'entendement desveillé,
Je cuiday finer mon propos;
Mais mon encre estoit gelée,
Et mon cierge estoit souflé.
De feu je n'eusse pu finer.
Si m'endormis, tout enmouflé,
Et ne peut autrement finer.

XL
Fait au temps de ladicte date.
Par le bon renommé Villon,
Qui ne mange figue ni datte;
Sec et noir comme escouvillon,
Il n'a tenté ne pavillon
Qu'il n'ait laissé à ses amys,
Et n'a mais qu'un peu de billon,
Qui sera tantost à fin mys.

Cy fine le testament Villon écrit en 1456

ile-de-houat-4
Île-de-Houat: Procession vers 1920